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26 mars 2018 1 26 /03 /mars /2018 12:15
Rencontre avec l'auteur Guy Morant

Interview

Bonjour et merci d’accepter de répondre à ces quelques questions

    • Je sais que c’est un cliché, mais je te remercie avant tout de me laisser la parole. Dans le monde des indés, un auteur n’a pas si souvent l’occasion de s’exprimer sur son travail. Ça nous évite d’attraper la grosse tête.

Comment as-tu commencé à écrire? Qui te lisait au début ?

 

    • J’écris depuis longtemps. Je suis passé par les illusions des débutants. Mon premier roman (jamais publié) était un désastre. Quand j’y pense, j’ai encore honte d’avoir demandé à mes proches de le lire. Ensuite, j’ai laissé tomber l’écriture de fiction pendant plusieurs années. Je m’y suis remis par hasard, quand je suis devenu professeur des écoles. J’écrivais des pièces de théâtre pour enfants. De fil en aiguille, j’ai repris goût à la fiction. J’ai écrit une série de fantasy pour pré-ados et un court roman humoristique.

    • Ma femme a toujours été ma meilleure critique, à la fois bienveillante et impitoyable. Quand elle me dit que c’est bon, j’ose montrer mon manuscrit à quelqu’un d’autre, comme un bêta-lecteur ou un lecteur qui a une expérience de ce que je décris (un policier, par exemple).

Quel est ton genre favori ?

 

    • J’ai toujours aimé les littératures de genre. Ado, je lisais de la science-fiction et de la fantasy. Il y a deux ans, j’ai découvert le polar et le thriller. J’ai été pris d’une véritable boulimie de lecture. J’en lisais et j’en lis encore des quantités industrielles. Et dire que je n’avais pas lu le moindre roman de ces deux genres avant 2016 ! Par contre, j’ai complètement abandonné la SF et la fantasy, et la littérature générale m’ennuie trop souvent.

Quel est ton processus créatif ? Qu’arrive-t-il avant que tu ne t’asseyes à écrire ?

 

    • D’abord, j’ai besoin de rêver mon histoire et de trouver un lien affectif avec l’intrigue et les personnages que je m’apprête à créer. Je prends des notes qui partent dans tous les sens. Mes idées de départ sont rarement celles que je choisirai en fin de compte, mais la motivation initiale reste la même.

    • Ensuite, j’entre dans une démarche de documentation très poussée. J’ai besoin de savoir où je vais. C’est un peu comme une image floue qui commence à se préciser. Par exemple, si j’imagine un groupe de la criminelle, je cherche des détails sur son travail au quotidien, les locaux qu’il occupe, le genre de personnes qui choisissent ce métier, etc.

    • Je m’assois pour écrire quand les idées deviennent irrésistibles, ou plutôt quand les images que j’ai dans la tête exigent d’être couchées par écrit. C’est un peu une obsession : je suis hanté par des personnages, des lieux, des situations. Quand j’en suis là, tout va très vite.

À quelle personne es-tu le plus à l’aise : à la première ou à la troisième personne ?

    • La troisième personne est plus distanciée. Quand je l’utilise, je choisis toujours un personnage point de vue plutôt qu’un narrateur omniscient. C’est parfois difficile de créer une véritable voix de personnage à la troisième personne, mais plus facile de faire avancer le récit et de décrire des faits extérieurs.

    • La première personne est plus intime, plus personnelle. Dans Effondrements, elle correspond à une langue plus littéraire. Elle permet de donner corps à un personnage et à susciter une certaine empathie.

    • Pour répondre à ta question, je me sens peut-être légèrement plus à l’aise à la première personne, mais j’aime surtout le changement de personne et de voix.

Quels écrivains admires-tu le plus ?

    • Je vais surtout te donner des noms d’auteurs de polars et de thrillers. J’admire énormément Michael Connelly, Harlan Coben, Lisa Gardner, Jussi Adler Olsen, Stieg Larsson, Henning Mankell, Lotte Hammer, Fred Vargas et tant d’autres que j’aurais du mal à les citer tous. Je connais encore mal le polar français, et j’avoue qu’il ne me donne pas pour l’instant les mêmes joies de lecteur que les littératures américaine et scandinaves.

Qu’est-ce qui rend crédible un personnage ? Comment crées-tu les tiens ?

    • Un personnage crédible, c’est d’abord un contexte : d’où il vient, comment il gagne sa vie, qu’est-ce qu’il aime, qui sont ses amis, est-il marié ? Il faut répondre à de très nombreuses questions très concrètes et matérielles.

    • La deuxième couche, ce sont ses raisons d’agir, ses motivations profondes. Pour les connaître, il est nécessaire de s’identifier au personnage. Par exemple, j’aime bien répéter qu’un bon méchant est profondément persuadé que c’est lui le bon de l’histoire. Si tu veux créer un personnage qui tienne la route, tu dois le voir de l’intérieur.

    • Pour inventer mes personnages, j’essaie souvent de trouver une personne de la vraie vie qui lui ressemble. Ensuite, j’essaie de comprendre ce que c’est de vivre la vie de cette personne. Ses peurs, le rapport qu’elle a avec son corps, ce qu’elle aime, ce qu’elle mange, son rapport aux autres, ce qui la fait vibrer. Un moment, je sens que le personnage commence à vivre à l’intérieur de moi. Il fait ses propres choix, refuse de m’obéir, un peu comme si j’avais fabriqué une sorte de double. Je sais alors qu’il est prêt.

Au plus profond de ta motivation, pour qui écris-tu ?

    • Question difficile, évidemment. On croit savoir, mais on se trompe souvent. Je vais te donner plusieurs réponses : j’écris pour exister, j’écris pour inviter les autres dans mon monde, j’écris pour comprendre le monde et la vie, j’écris pour savoir comment vivre ma vie, j’écris pour donner du sens au chaos. C’est tout ça, et plus encore. Tout ce que je sais, c’est que je n’arrive jamais à me passer d’écrire très longtemps.

Les avis (négatifs ou positifs) des lecteurs te servent-ils ?

    • Les lecteurs ne se trompent jamais. Quand ils écrivent un avis, ça correspond à quelque chose qu’ils ont ressenti. Il ne faut pas forcément le prendre au pied de la lettre, mais je ne néglige jamais un commentaire. Comme je suis perfectionniste, j’ai tendance à tomber d’accord avec les critiques et à douter des compliments. Très souvent, je me demande si je suis à la hauteur. Par contre, les insultes ne me touchent pas. Je me sens agressé, bien sûr, mais pas ébranlé dans ce que je suis.

Partages-tu tes projets d’écriture avec une personne de confiance afin d’avoir son opinion ?

    • Oui, ma femme, principalement. Je lui demande son avis et j’en tiens compte. Si elle n’adhère pas du tout au projet, je le laisse tomber facilement.

T’imposes-tu une discipline, en termes de calendrier, d’objectifs etc. ?

    • J’ai besoin d’acquérir une certaine vitesse de croisière pour rester dans mes projets. En dessous de mille mots par jour, je commence à perdre le fil. Ma discipline n’est pas absolue, mais je reste concentré pendant toute la période d’écriture. C’est un peu comme un marathon ou comme les répétitions d’un pianiste. C’est intense et obsessionnel, parfois envahissant, mais j’ai besoin de ça.

De quoi t’entoures-tu quand tu écris pour favoriser ta concentration ?

    • Je n’ai pas tellement besoin de favoriser ma concentration, mais de stimuler mon imagination. Pendant les périodes d’écriture, j’écoute toujours énormément de musique. Les voyages m’aident aussi à sortir de mes habitudes.

Écris-tu sur écran, imprimes-tu souvent, corriges-tu sur papier...? Quel processus suis-tu ?

    • J’écris des paragraphes et des chapitres, que je ne relis pas. Je reviens sur certains passages pour vérifier des détails ou mettre des informations en cohérence. Pour moi, c’est un peu comme si ces fragments coexistaient, comme si tout avait lieu au même moment. Je garde l’empreinte de ce que j’ai écrit, et je vois mon livre comme une totalité plus que comme une succession d’événements.

    • Je n’imprime que tout à la fin, lors de la relecture. L’impression papier me permet de me distancier de ce que j’ai écrit. Je retravaille mon texte successivement sur papier et sur écran. J’attends ensuite les retours des premiers lecteurs (à commencer par ma femme) et je réécris les passages qui n’ont pas été compris ou appréciés. Je tiens compte de toutes les remarques des premiers lecteurs. Elles m’inspirent souvent de nouvelles idées. Je coupe également tous les passages qui ne sont pas absolument nécessaires. Si un paragraphe peut être enlevé sans que le roman en souffre, c’est qu’il doit l’être.

Quelle a été ton expérience avec les maisons d’édition ?

    • J’ai été publié une fois. C’était un essai sur l’école (sous pseudo). L’expérience a été catastrophique. Un fiasco artistique et commercial. Je n’ai jamais été payé.

    • Par la suite, j’ai envoyé quelques manuscrits à un choix de maisons, mais j’étais échaudé par ma première expérience. Pour moi, l’auto-édition s’est imposé comme une évidence. Cela dit, je serais prêt à collaborer avec une maison d’édition qui m’accompagnerait dans le processus de réécriture et de promotion.

Sur quel projet travailles-tu en ce moment ?

    • Je rassemble des idées pour le deuxième volume de la série Alaric Autier.

Le dernier mot est pour toi…

    • J’estime que le temps des lecteurs est précieux. Je suis toujours très reconnaissant qu’un(e) inconnu(e) consacre une partie de ses loisirs à lire mes romans. Au fond, c’est peut-être ma vraie motivation pour écrire : apporter de la joie et du sens à mes lecteurs, rendre leur vie plus riche et plus profonde.

Merci de t’être livrée à moi et aux lecteurs

Je te suis reconnaissant de m’en avoir donné l’occasion, Céline.

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